Mythe et réalité d’un ministre…

Décryptage du Mythologue : Dégueulasse, la cuisine de l’Elysée ?

Publiésur Influencia  le 07 avril 2014
Décryptage du Mythologue : Dégueulasse, la cuisine de l’Elysée ?

 

La cuisine de l’Elysée serait « dégueulasse » selon les propos murmurés sur le perron de Matignon à l’adresse du premier ministre par Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur de la France…

Le ministre du commerce extérieur est un peu le VRP de la France et le Premier ministre son directeur commercial. A-t-on souvent vu un VRP dire que le produit de la firme est « dégueulasse », devant les clients chinois qui ont goûté à la « tambouille » ? La ministre voulait-elle narguer le PDG de la « boîte » et « faire de la lèche » au directeur commercial ? Ce que l’on peut reprocher à nos dirigeants politiques, c’est en effet, leur inconséquence. Tel ministre fustigeant nommément de grands patrons français ou étrangers, tel dirigeant d’un autre bord comparant la France à un pays totalitaire, jusqu’à cette « bourde » mettant à mal ce qui nous était reconnu comme un point d’excellence. Peut-on prôner l’art de vivre à la française et scier ainsi le plus beau fleuron de notre exception culinaro-culturelle ?

 

 

La vérité culinaire selon Narcisse

 

En matière culinaire comme dans d’autres « beaux-arts », la vérité n’existe pas puisqu’il s’agit de jugement personnel. On aime désormais « l’hérésie » de mélanger salé-sucré, ce qui était jadis un interdit. Pour se « rincer la bouche », on avalait un « trou normand » comme un mur de séparation, une frontière gustative entre le salé et le sucré. Notre ministre aurait pu dire qu’elle n’avait pas apprécié, que le repas n’avait pas été de « son goût ». Mais connoter qu’on a servi une boîte de « Canigou » au président chinois qui est venu, entre autres, s’intéresser à nos entreprises agro-alimentaires, est un peu fort de café !

 

Quand chacun d’entre nous aura compris qu’il n’est ni le nombril du monde ni le jugement de toutes choses, que d’autres perceptions peuvent être tout aussi « justes », l’humanité progressera vraiment et notre commerce extérieur se portera peut-être mieux également. Car ce mode de pensée (et d’expression) est ce qui fait le plus de tort à la France. Notre narcissisme est souvent notre tombe. On interrogea un devin à la naissance de Narcisse sur son espérance de vie « Il atteindra la longévité, s’il ne se regarde pas » répondit le sage. Nous pourrions reprendre cette formule pour beaucoup de nos activités humaines, politiques bien sûr mais également dans les entreprises. Le secret de la durée ? Ne pas s’admirer ! C’est bien la leçon à retenir du mythe de Narcisse.

 

 

Mais la ministre était de bonne foi, nous dira-t-on

 

André Comte-Sponville répond secrètement à la ministre : « A faire de la bonne foi un absolu, on la perd puisqu’elle n’est plus bonne, puisqu’elle n’est plus que véracité désséchée…Ce n’est plus bonne foi, c’est véridisme ; ce n’est plus vertu, c’est fanatisme…Fanatisme de philosophe qui aime la vérité à la folie. Mais aucune folie n’est bonne. » Ne voulant pas passer ni pour folle, ni pour Narcisse, la ministre s’est excusée auprès du chef de l’Elysée qui, à son tour, se sent offensé et refuse les excuses. Rappelons leur à tous les deux que ce n’est pas parce que la vérité est bonne qu’il faut l’aimer mais que « c’est parce qu’elle nous paraît bonne que nous l’aimons » ! Narcisse, toujours Narcisse !